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Mathilde Cohen

Faculté de droit de l’Université du Connecticut, Etats-Unis (Programme FIAS)
« Le lait de la mère appartient à l'enfant ». Une histoire du droit du lait humain en France entre technologie, genre et colonialisme (1910-2024)
01 septembre 2024 - 30 juin 2025
Droit
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Mathilde Cohen est professeure de droit à l'Université du Connecticut, où elle détient la chaire « George Williamson Crawford ». Ancienne élève de l'École normale supérieure et de la Sorbonne à Paris, ainsi que de l'Université de Columbia à New York, le fil rouge de ses recherches réside dans l’étude des effets de domination propres aux cultures juridiques françaises et états-uniennes. À partir de méthodologies multi-situées, son travail a exploré, entre autres, les motivations des institutions publiques pour justifier leurs décisions, les identités, pratiques linguistiques et modes de décision des magistrat.es, ainsi que des phénomènes incarnés peu étudiés tels que l'alimentation et l'allaitement qui ont pourtant un impact direct sur la santé et la sécurité des adultes et des enfants. Cette approche l'a amenée à poser des questions essentielles sur la réglementation de l'alimentation et des fluides corporels. Mathilde examine ces différents sujets à l'intersection du droit constitutionnel, du droit comparé, de la sociologie et d'autres sciences sociales.

En septembre 2024, elle rejoint l'IEA de Paris dans le cadre du programme FIAS - French Institutes for Advanced Study - cofinancé par le programme cadre Horizon 2020 de l'Union européenne - Grant Agreement Marie Skłodowska-Curie n° 945408. Sa résidence de recherche bénéficie également d'un financement national dans le cadre du LABEX RFIEA+ (convention ANR-11-LABX-0027-01).

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Sujets de recherche

Droit constitutionnel, droit de l’alimentation, droit de la santé, genre et droit, droit pénitentiaire, magistrat.es et juridictions

« Le lait de la mère appartient à l'enfant ». Une histoire du droit du lait humain en France entre technologie, genre et colonialisme (1910-2024)

Ce projet étudie l’institutionnalisation en France, dans une visée d’abord populationniste, de la circulation du lait humain désincarné, c’est-à-dire exprimé et distribué en flacon au lieu d’être pris directement au sein. Le processus, rompant le lien physique entre la personne allaitante et l’enfant allaité par le recours à la science, à la technique et au droit, est celui d’une médicalisation progressive. Au cours de la période étudiée, de 1910 à 2024, le don de lait passe d’une forme d’assistance aux femmes et aux enfants les plus démunis à une technique biomédicale. Après la seconde guerre mondiale, la pratique se transforme en effet en service médicalisé de pointe, appelé « lactarium », centré sur le soin des bébés prématurés. Le droit joue un rôle déterminant dans cette évolution : si le début du XXe siècle envisage la mise en nourrice sur un mode économique, ancré dans le droit du travail et de la concurrence, la circulation du lait humain se met à relever peu à peu du droit de la santé, puis de la bioéthique. Les pédiatres, qui trouvent dans la réglementation matière à lutter contre la mortalité infantile, la modèlent largement. C’est ainsi qu’en un siècle, la circulation désincarnée du lait humain passe du statut de service professionnel rémunéré à celui de don anonyme et bénévole, sans que disparaissent pour autant les rapports de domination qui la structurent. L’état du droit actuel — qui depuis le début des années 1990 a rendu le don de lait obligatoirement gratuit — continue à faire obstacle à la reconnaissance politique et économique de la production du lait comme travail reproductif.

Publications clés

Milk from Mars. Lab-Produced Human Milk and Its Regulation”, Food & Drug Law Journal, vol. 77, pp.6-50 (2022) (with Tanya Cassidy).

Making Milk. The Past, Present and Future of Our Primary Food (co-edited with Yoriko Otomo, Bloomsbury, 2017).

The Linguistic Design of Multinational Courts. The French Capture”, International Journal of Constitutional Law, vol. 14, pp. 498-517 (2016).

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2024-2025