Intelligence et bêtise artificielle
Conférence de Warren Sack (résident 2015-2016 / 2016-2017 de l'IEA de Paris), organisée en partenariat avec l’Institut de Recherche et d’Innovation du Centre Pompidou et l’EnsadLab
Résumé
Dans son livre Stupidity (University of Illinois Press, 2002), Avital Ronell nous rappelle qu’en philosophie, «la plupart du temps, la bêtise a été assimilée à l’erreur et aux préoccupations épistémologiques dérivées. […] Le concept d’erreur ne peut cependant pas rendre compte de l’unité de la stupidité et de la cruauté ou du rapport du tyran à l’imbécile »(p.20). Pourtant, je soutiendrai que même si le concept d’erreur n’est pas suffisant, l’automatisation – en particulier la formalisation et la mise en œuvre d’algorithmes pour éliminer les erreurs de pensée et de production – peut expliquer la stupidité et la cruauté. Je rendrais compte de l’importance industrielle et intellectuelle croissante des algorithmes, en particulier des calculs arithmétiques, qui a conduit Charles Babbage, au XIXe siècle, à se demander s’ils pouvaient être produits par une machine et ainsi réalisées plus rapidement et avec moins d’erreurs qu’à la main. Cette volonté d’automatiser les gens au XIXe siècle a paradoxalement conforté une image de l’histoire antérieure des algorithmes dans leurs fondements contemporains: Alan Turing et Donald Knuth, au XXe siècle, ont tous deux basé leur conception de l’algorithme sur une image d’un homme avec du papier et un stylo et qui aurait pu être emprunté à une école de comptabilité vénitienne du XIVe siècle. Plus l’arithmétique est devenue importante pour le capitalisme (marchand, puis industriel, financier et linguistique), plus des activités comme « apprendre » – ont été transcrites en algorithmes arithmétiques. Nous devons nous demander, comme l’a fait le philosophe Herbert Marcuse à propos du capitalisme industriel, qui est cet homme unidimensionnel si dépourvu de pensée critique et de facultés d’opposition – placé au centre du capitalisme contemporain et de ses algorithmes? Et que se passerait-il si nous concevions des systèmes d’inclusion au lieu de systèmes d’exclusion et d’isolement?
Plus d'informations (site de l'EnsadLab)
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