Quand l’identité a fait sombrer la gauche américaine
Par Laurent Joffrin
Extrait :
"Contempteur de la politique démocrate «versus» Clinton et Obama, l’historien Mark Lilla reproche aux progressistes d’avoir abandonné les classes populaires au profit des minorités. Un essai qui fait polémique outre-Atlantique.
Voilà un Américain de gauche (un «liberal», dit-on aux Etats-Unis) qui énerve autant la gauche que la droite. Mark Lilla est un professeur d’histoire des idées à l’université Columbia qui est soudain devenu le centre d’une furieuse polémique. Né à Detroit, habitant aujourd’hui Brooklyn, il écrit régulièrement dans la New York Review of Books et dans le New York Times. Son petit livre, The Once and Future Liberal («l’homme de gauche d’hier et de demain»), a suscité un tumulte du diable dans les cercles de la gauche américaine, universitaire ou militante. Constatant le renouveau du progressisme américain consécutif à l’élection de Donald Trump, Mark Lilla veut lui rendre force et efficacité en questionnant ses fondements intellectuels. Sa cible, consciencieusement démolie tout au long de ces 160 pages serrées et brillantes ? La «politique de l’identité» qui a fait déraper la gauche américaine et a prononcé son destin d’éternelle minoritaire. Deux époques se sont succédé dans l’histoire de la gauche américaine, dit-il, l’ère de Roosevelt et de ses successeurs, Kennedy, Johnson et quelques autres, fondée sur les idées d’égalité, de citoyenneté, et de solidarité, puis, à partir des années 80, celles des minorités et de l’identité, plus ou moins rassemblées dans le Parti démocrate (plutôt moins que plus), et surtout répandues dans les cercles universitaires et activistes."
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