Le principe de l'intime conviction, qui ne rend pas les preuves nécessaires, a été estimé inconcevable durant des siècles. Au Moyen Âge, les juristes ne cessent de dire que le juge ne doit pas juger selon sa conscience, mais en se fondant sur la loi et sur des preuves. À l'époque moderne, les juges doivent s'appuyer sur le système des preuves légales, « plus claires que le jour ». Mais depuis la Révolution, les jurés d'assises jugent selon leur intime conviction, « en leur âme et conscience ». L'intime conviction n'est-elle pas une forme de sécularisation de l'idée religieuse de conscience ? (A. Padoa-Schioppa)
De nombreux travaux ont révélé que, en dépit de l'affirmation souvent réitérée de l'obligation faite aux juges de juger selon la loi et non en suivant leur conscience, les penseurs faisaient état d'une réalité plus complexe : les rapports entre le droit et la conscience sont affectés par une tension qui non seulement ne s'est jamais démentie, mais qui s'est développée jusqu'à placer la conscience au premier rang, sans pour autant que la tension disparaisse. Ce colloque souhaite reprendre cette question où bien des pistes ont déjà été tracées, mais dont plusieurs demandent à être prolongées ou reprises. Elle sera examinée tant sous l'angle doctrinal qu'à travers les pratiques, les représentations et les fictions, et elle fera donc appel principalement aux historiens, aux juristes, aux philosophes, aux spécialistes de la littérature. Toutes les catégories de documents pourront être sollicitées : textes doctrinaux, manuels, documents judiciaires, chroniques et textes narratifs, fictions, images…