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Les grands esprits se racontent

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Libération, 8 décembre 2013

A l’époque du club des Haschichins, le magnifique et décati hôtel de Lauzun accueillait Baudelaire et Balzac. Aujourd’hui, rénové, il reçoit des chercheurs du monde entier au sein de l’Institut d’études avancées de Paris.
L’île Saint-Louis, au coeur de Paris, est encore pleine de ses mystères. Et ses vieux hôtels particuliers toujours bruissants de secrets et d’extases. «Au 56, 7, 8 (peu importe) de la rue X, si vous frappez à la porte d’abord un coup, puis trois autres, on vous laisse entrer, seul et parfois même accompagné.»
Ce sentiment d’arriver dans le lupanar gainsbourien de Melody Nelson, nulle adresse ne le procure mieux que le 17, quai d’Anjou, dans le nord-est de l’île, où se dresse depuis 1657 le bel hôtel de Lauzun. Cette maison à l’intérieur richement décoré fut, dans les années 1840, un équivalent parisien (avant l’heure et sans les prestations hôtelières) du Chelsea Hotel de New York, fréquentée et parfois même habitée par les artistes bohèmes de l’époque, et non des moindres : Baudelaire, Théophile Gautier, Balzac, Nerval, Flaubert, Dumas, Delacroix, Daumier. Or, depuis le mois dernier, l’adresse a de nouveaux résidents qui, eux aussi, aiment à penser dans les marges, d’autres marges : ce sont une vingtaine de chercheurs en sciences humaines et sociales venus de toute la planète. L’hôtel de Lauzun est devenu le nouveau siège de l’Institut d’études avancées de Paris, une manière de Princeton français, d’une envergure bien plus modeste. Cet organisme a en
effet pour vocation «d’accueillir en résidence à Paris des chercheurs internationaux de haut niveau dans des conditions de recherche favorisant la créativité et l’innovation». Ces conditions étant grosso modo la possibilité de jouir de Paris sans bourse délier, l’esprit libre.

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