Vers une offre islamique d'Etat séculier ?
Intervention de Zekeria Ahmed Salem lors de la Cinquième Rencontre européenne d'analyse des sociétés politiques, sur le thème "Printemps arabes : mythe et fictions".
Présentation
La vague de contestations qui a balayé les pays dits arabes dans le sillage du renversement de Ben Ali, en Tunisie, s'est immédiatement révélée être une formidable expérience de laboratoire pour la sociologie historique comparée du politique. Ce banc d'essai a confirmé l'inanité de quelques-unes des écoles de pensée les plus en cour dans les milieux universitaires et médiatiques. L'explication culturaliste, l'importance accordée à l'islam, la rêverie « transitologique » n'ont été d'aucun secours pour comprendre les événements. En revanche, la comparaison implicite et intuitive de cette vaste mobilisation avec le Printemps des peuples européens, en 1848, a été bien inspirée, car elle mettait d'emblée le doigt sur quelques éléments clefs : la combinatoire entre les logiques, trop souvent tenues pour contradictoires, de l'expansion mondiale du capitalisme, en l'occurrence sous sa forme néolibérale, et de l'affirmation du périmètre national ; les connexions entre les différents Etats-nations dans une aire géographique donnée, et leur écho à l'échelle du monde, bien au-delà de leur « aire culturelle » ; l'historicité irréductible de chacune des situations considérées.
Le Printemps arabe est un mythe. Il s'est conjugué au pluriel et ne se laisse enfermer dans aucune catégorie générique, ni celle del'arabité ni celle de l'islam. Il se cherche par les armes comme dans les urnes. Et c'est bel et bien par la singularité de ses épisodes qu'il accède à l'universalité et qu'il parle aux Indignés européens ou qu'il effarouche les autorités chinoises, qu'il montre les apories de la chirurgie militaro-démocratique et qu'il dissipe le trompe l'oil de la raison électorale, qu'il réhabilite cette vieille idée de la révolution que d'aucuns pensaient soluble dans la « démocratie de marché » et fait resurgir en pleine lumière la figure, tenue pour désuète, du militant, syndicaliste ou avocat de la cause des droits de l'Homme, sans laquelle Facebook n'aurait produit aucun miracle.
Au-delà des fictions auxquelles ils ont donné lieu et qui enchantent, les Printemps arabes nous rappellent que le politique est d'abord un rapport à l'inégalité sociale, voire la production de celle-ci, notamment dans le
domaine économique (atelier 1). De ce point de vue aussi, la comparaison avec 1848 est riche d'enseignements. Ensuite, la politique est un art de la contingence : les mobilisations sociales et démocratiques ont contraint les acteurs à inventer des processus et des institutions provisoires pour définir les nouveaux rapports de force constitutifs de la cité future (atelier 2). La question se pose alors de savoir si le partage de l'espace public au gré des manifestations et la coexistence, ou la collaboration, dans les instances provisoires qui ont été mises en place pour accompagner, assurer ou limiter le changement, ont favorisé des recompositions, dont la plus décisive pourrait être l'émergence d'une offre islamique d'Etat séculier (atelier 3).
Un an après leur éclosion, les Printemps arabes sont loin d'avoir donné tous leurs fruits. Sans anticiper sur les récoltes futures, nous goûterons les premiers d'entre eux, en partant, à tout seigneur tout honneur, des situations différenciées du Maghreb et en confrontant celles-ci aux contrepoints du Machrek, du Golfe et de la Turquie.
Le Printemps arabe est un mythe. Il s'est conjugué au pluriel et ne se laisse enfermer dans aucune catégorie générique, ni celle del'arabité ni celle de l'islam. Il se cherche par les armes comme dans les urnes. Et c'est bel et bien par la singularité de ses épisodes qu'il accède à l'universalité et qu'il parle aux Indignés européens ou qu'il effarouche les autorités chinoises, qu'il montre les apories de la chirurgie militaro-démocratique et qu'il dissipe le trompe l'oil de la raison électorale, qu'il réhabilite cette vieille idée de la révolution que d'aucuns pensaient soluble dans la « démocratie de marché » et fait resurgir en pleine lumière la figure, tenue pour désuète, du militant, syndicaliste ou avocat de la cause des droits de l'Homme, sans laquelle Facebook n'aurait produit aucun miracle.
Au-delà des fictions auxquelles ils ont donné lieu et qui enchantent, les Printemps arabes nous rappellent que le politique est d'abord un rapport à l'inégalité sociale, voire la production de celle-ci, notamment dans le
domaine économique (atelier 1). De ce point de vue aussi, la comparaison avec 1848 est riche d'enseignements. Ensuite, la politique est un art de la contingence : les mobilisations sociales et démocratiques ont contraint les acteurs à inventer des processus et des institutions provisoires pour définir les nouveaux rapports de force constitutifs de la cité future (atelier 2). La question se pose alors de savoir si le partage de l'espace public au gré des manifestations et la coexistence, ou la collaboration, dans les instances provisoires qui ont été mises en place pour accompagner, assurer ou limiter le changement, ont favorisé des recompositions, dont la plus décisive pourrait être l'émergence d'une offre islamique d'Etat séculier (atelier 3).
Un an après leur éclosion, les Printemps arabes sont loin d'avoir donné tous leurs fruits. Sans anticiper sur les récoltes futures, nous goûterons les premiers d'entre eux, en partant, à tout seigneur tout honneur, des situations différenciées du Maghreb et en confrontant celles-ci aux contrepoints du Machrek, du Golfe et de la Turquie.
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Living and Challenging the Legacy of Slavery in Africa and in the Contemporary Muslim World – Comparative Approach from the Case of the Islamic Republic of Mauritania 01 January 2012 - 30 June 2012 |
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